Démarches et pratiques
Le share deal : une progression à bas bruitLa part prépondérante du marché foncier sociétaire (vente de parts de société) est observée de longue date pour les terres agricoles. Le marché immobilier est désormais également concerné par la montée en puissance des transactions opérées sous forme de cessions de titres de société détenant un actif immobilier. Mais le phénomène demeure difficile à quantifier en raison du manque de transparence de ces transactions.
Le share deal : de quoi parle-t-on ?Le « share deal » désigne des échanges de parts sociales de sociétés commerciales à prépondérance immobilière (l’article 726-I-2° du Code général des impôts rappelle qu’est « considérée par la loi comme à prépondérance immobilière la société dont l’actif est, ou a été au cours de l’année précédant la cession en cause, principalement constitué d’immeubles ou de droits immobiliers situés en France ou de participations dans des personnes morales non cotées elles-mêmes à prépondérance immobilière »).
Le « share deal » est une transaction où le contrôle d'une société possédant un ou plusieurs actifs immobiliers est transféré à travers la cession majoritaire de ses parts. Cette méthode de transaction est couramment utilisée pour les transmissions d'entreprises ou les successions, particulièrement dans le secteur de l'immobilier complexe.
Un montage avantageux
Le « share deal » peut permettre de bénéficier de conditions fiscales avantageuses. Par exemple, dans le cas d'une succession, un partage des titres de l'entreprise entre héritiers peut être orchestré pour optimiser les impacts fiscaux tout en conservant la structure de propriété au sein de la famille.
Du point de vue légal, les transactions de « share deal » se distinguent par leur simplicité formelle. Pour les sociétés civiles, la cession se réalise par acte sous seing privé ou acte notarié, et pour les sociétés de capitaux, elle est validée par l’inscription des actions au compte du bénéficiaire et une déclaration au service des impôts des entreprises. Selon l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l'habitation, les transactions via share deal ne nécessitent pas les délais de rétractation ou de réflexion obligatoires dans les ventes directes d'immeubles, ni la fourniture d'un dossier de diagnostic technique prévu à l'article L. 271-4 du même code. Fiscalement, les « share deals » sont particulièrement avantageux comparativement aux ventes directes d’immeubles qui sont assujetties à des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), généralement entre 5,80 % et 6,40 %. Par exemple, pour une société à prépondérance immobilière, les cessions d'actions ou de parts sociales dans un « share deal » peuvent être taxées à des taux nettement inférieurs, à 5 % sur une assiette réduite à la valeur nette des titres, selon les dispositions du Code général des impôts.
Vers une attention et vigilance renforcées
Dans le secteur agricole, face au volume important et croissant de surfaces faisant l’objet de cessions de parts de sociétés, la loi dite « Sempastous » du 23 décembre 2021 vise à réguler le marché foncier agricole par le contrôle des cessions de parts sociales dans les sociétés agricoles, et à améliorer la transparence des marchés.
Plus récemment, pour le marché immobilier, selon une logique relativement comparable, face à l'usage croissant des « share deals » et les lacunes dans la transparence de ces transactions, des mesures législatives ont été prises pour en renforcer le cadre. Ainsi, l’article 119 de la Loi de finances 2024, a introduit des modifications à l'article 726 du Code général des impôts, visant à mieux encadrer ces transactions pour prévenir les abus et assurer une meilleure transparence fiscale et économique.
À retenir
Les transactions immobilières opérées sous forme de cessions de titres de société (Share Deals) progressent sur le marché immobilier. Cet essor, fondé sur les avantages fiscaux et la simplicité relative de ces montages, est difficile à mesurer en raison du manque de transparence de ces transactions. Des mesures ont récemment été adoptées pour en améliorer le suivi et l’encadrement.
Pour en savoir +... Rapport de l'ORF sur la régulation des valeurs foncièresAu sommaire : Le mot de Catherine Aubey-Berthelot, présidente de l’Observatoire Régional du foncier • Démarches et pratiques – Le difficile équilibre entre droit de propriété et intérêt général par Maître Frédéric Levy de DS Avocats – Le share deal : une progression à bas bruit • Foncier Juridique – Le share deal : une progression à bas bruit par Hugo Thierry • Direction générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature
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