Foncier juridique
Mise en place des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturationDatés du 21 novembre 2024, les trois textes réglementaires (>un décret en Conseil d’Etat, un décret simple et un arrêté ministériel) précisant les modalités d’agrément et de suivi des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR), ont officiellement lancé ce dispositif créé le 23 octobre 2023 par la loi Industrie verte.
Les SNCRR sont des sites multifonctionnels, au service de trois principaux enjeux.
Tout d’abord, à l’instar des sites naturels de compensation (SNC) qu’ils remplacent, ils visent à développer la compensation par l’offre des atteintes à la biodiversité, notamment auprès des porteurs de projets tenus de mettre en œuvre des mesures compensatoires en application de la séquence « éviter-réduire-compenser ».
Par ailleurs, les SNCRR peuvent être mobilisés pour des actions de renaturation menées dans le cadre de la trajectoire de sobriété foncière, en vue de l’atteinte de l’objectif Zéro artificialisation nette des sols en 2050 (ZAN).
Enfin, ils sont désormais accessibles aux personnes publiques ou privées engagées dans des actions volontaires de restauration et de renaturation. Cette nouvelle vocation devrait contribuer à amplifier les financements dédiés à la préservation de la biodiversité.
Il convient de souligner que les SNCRR peuvent donner lieu à l’attribution de crédits carbone au titre du label « bas-carbone ».
Cette évolution s’inscrit dans un contexte où les SNC, institutionnalisés par la loi pour la reconquête de la biodiversité de 2016, n’ont pas rencontré le succès attendu : avant la loi Industrie verte, on ne comptait en France que trois sites agréés - Cossure (13), Cros du Mouton (83) et l’abbaye de Valmagne à Villeveyrac (34).
Les décrets d’application des SNCRR visent ainsi à apporter les précisions et simplifications nécessaires à un recours plus large au dispositif, permettant notamment de mutualiser et d’anticiper les mesures de réhabilitation écologique de sites endommagés dans un territoire.
Tout d’abord, le décret en conseil d’Etat n°2024-1052 relatif à la restauration de la biodiversité, à la renaturation et à la compensation des atteintes à la biodiversité, affirme la nécessité de « proximité fonctionnelle » des SNCRR, qui doivent être implantés « en priorité sur le site endommagé » par le projet d’aménagement, ou en cas d’impossibilité, dans les zones de renaturation préférentielle identifiées dans les documents de planification (Article L141-10 du Code de l’urbanisme).
Leur fonctionnement se veut simplifié par une demande d’agrément à adresser au Préfet de Région (auparavant au Ministre). L’opérateur identifie en amont un site présentant un réel gain écologique à être compensé, renaturé ou restauré, puis sollicite l’agrément qui atteste de la pertinence écologique du projet. La demande d’agrément est instruite par les Directions régionales de l’environnement de l’aménagement et du logement (DREAL), selon des critères tels que l’implantation du SNCRR, la maîtrise foncière, la qualité écologique du projet ou encore les modalités d’entretien (liste détaillée en annexe de l’arrêté ministériel). L’agrément est délivré après l’avis du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel ou du Comité national de protection de la nature le cas échéant, selon les modalités prévues par les décrets n°2024-1052 et 1053.
Afin d’alléger l’opérateur d’une partie du portage financier, les unités de compensation, de renaturation ou de restauration (UCRR) peuvent être commercialisées dès l’obtention de l’agrément. L’opérateur lui-même peut s’en porter acquéreur. Les UCRR ne peuvent pas être revendues.
La durée minimale de l’agrément, définie à 30 ans, et un suivi assuré par un comité local devront garantir la pérennité des gains écologiques du SNCRR.
Suites : un objectif politique de 17 SNCRR à l’horizon 2027 a été fixé : pour y parvenir, plusieurs outils complémentaires sont en cours d’élaboration. L’Office français de la biodiversité (OFB) produit un inventaire des sites à fort potentiel de gain écologique, afin de faciliter la mobilisation du foncier et la mise en relation des propriétaires fonciers avec les porteurs de projets. La Banque des Territoires et CDC Biodiversité ont annoncé de leur côté la création d’une foncière de biodiversité, ciblant un investissement de dix millions d’euros
• Violette Legros • DRIEAT / ORF
À retenir
La loi Industrie verte du 23 octobre 2023 a fait évoluer les anciens sites naturels de compensation (SNC), créés par la loi de reconquête pour la biodiversité de 2016, en sites naturels de compensation, de renaturation et de restauration (SNCRR). Le dispositif renouvelé est ainsi ouvert aux opérations de renaturation et de restauration, notamment dans le cadre de la compensation carbone et de l’objectif de zéro artificialisation nette des sols, mais également à un large panel d’investisseurs issus du public comme du privé. Les deux décrets et l’arrêté datés du 21 novembre 2024 apportent au dispositif les précisions et simplifications attendues pour massifier leur utilisation dans les territoires et augmenter les financements de la lutte contre l’effondrement de la biodiversité.
Pour en savoir +
Demande d’agrément de site naturel de compensation, de restauration et de renaturation
Site internet du ministère de la transition écologique
Au sommaire : Le mot de Maître Xavier Lièvre, représentant de la chambre des notaires de Paris à l’ORF et de Pascal Dayre, responsable du service de l’action foncière, Ville de Paris • Démarches et pratiques – Le rôle des observatoires de l’habitat et du foncier par Gaultier Baratte, Bureau de la connaissance et des politiques foncières (AD3) Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, Direction Générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature – Le défi de la renaturation en contexte urbain dense et contraint par Delphine Gemon, Léa Grandpierre, Direction de l’aménagement et des déplacements, Est Ensemble• Foncier Juridique – Mise en place des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation par Violette Legros, DRIEAT / ORF
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